Adhésion

"Voulant préférer miséricorde à la rigueur des lois"

lettre de rémission de Louis XV en faveur d'un criminel (1730)

Le document présenté ce mois-ci est une lettre de rémission accordée à Jean Griffeuille, domestique, originaire du village de la Cassaigne (aujourd’hui Lacassagne), paroisse de Labesserette. La lettre de rémission est un acte de la Chancellerie par lequel le roi octroie son pardon, sa grâce ou son indulgence, à la suite d’un crime ou d’un délit, allant contre le cours ordinaire de la justice. Toutefois,......[Lire la suite]

 Souvenirs du Colonel de La Rocque à Vic-sur-Cère

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Dans le petit village d’Olmet, sur la commune de Vic-sur-Cère, se trouvent deux bâtiments édifiés dans les années 1960 en souvenir du Colonel de La Rocque : la chapelle Notre-Dame-des-Croix et la « Maison du souvenir ». Ils ont été dessinés et conçus par Alphée Delrieu, architecte à Vic-sur-Cère, dont le fonds est en cours de classement aux Archives départementales. L’histoire de ces bâtiments est méconnue et pose questions. Pourquoi honorer la mémoire du Colonel de La Rocque dont l’image est pour le moins ambiguë ? Et pourquoi à Vic-sur-Cère ?   

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Né le 6 octobre 1885 à Lorient, François de La Rocque (1885-1946) descend d’une famille originaire de Haute-Auvergne, qui tient son nom du hameau de La Roque à Saint-Clément. Il est le fils du général d’artillerie de marine Raymond de La Rocque. Il entre à Saint-Cyr en 1905, puis sert en Algérie et au Maroc. Grièvement blessé en 1916, il est rapatrié en France mais repart volontairement dans les tranchées de la Somme pour y commander un bataillon. La Rocque est en 1918, à 33 ans, le plus jeune chef de bataillon de l'armée française, avec dix citations au combat. Il est décoré de la croix de guerre et est fait officier de la Légion d'Honneur. Il démissionne de l’armée en 1927 avec le grade de lieutenant-colonel et entre en 1929 aux Croix de Feu, association d'anciens combattants fondée préalablement à son arrivée par Maurice d'Hartoy et réservée aux seuls décorés de la croix de guerre.

Il en prend la présidence en 1932 et ouvre le mouvement aux non décorés, ainsi qu’aux femmes et aux plus jeunes. La Rocque et les Croix-de-Feu se distinguent des autres ligues par leur respect de la légalité républicaine. Il refuse en outre toute alliance avec l’extrême-droite de Doriot et le mouvement de la Cagoule. Il sera un opposant avéré aux courants et discours antisémites. Néanmoins le colonel de La Rocque subit des injures et des calomnies très violentes et devient, pour une partie de l'opinion, le symbole du fasciste français, en raison notamment de son étiquette nationaliste, de son attachement à un régime parlementaire fort et de son attitude mal comprise vis-à-vis du régime de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale.

Suite à la dissolution des « ligues », La Rocque fonde en 1936, aux côtés de l'aviateur Jean Mermoz, le Parti Social Français (PSF). A la veille de la guerre, le PSF est le plus important parti politique français, avec un million d’adhérents. Le 16 juin 1940, il signe un éditorial intitulé « Résistance », dans le Petit Journal, et quand survient l'armistice du 22 juin 1940, il rappelle que cette situation dramatique ne suspend nullement les hostilités et dénonce la collaboration avec l'Allemagne : « pas de collaboration sous l'occupation ». À l'égard du régime de Vichy, il précise : « loyalisme à l'égard du maréchal Pétain, mais réserve absolue à l'égard du gouvernement de Vichy ». Il est le fondateur du réseau Klan (juin 1942) destiné à recueillir des renseignements militaires transmis aux services britanniques. Interrogé une première fois en 1941 par les Allemands, La Rocque est arrêté le 9 mars 1943 par la Gestapo en même temps que 150 cadres PSF. Interné à Fresnes puis à la prison du Cherche-Midi, La Rocque est transféré à Eisenberg (Tchécoslovaquie) aux côtés de Pierre de Gaulle puis à Itter (Autriche). Il revient en France libérée le 9 mai 1945 et se voit placé en internement administratif jusqu'au 31 décembre 1945 afin de l'éloigner des affaires politiques, notamment des négociations du Conseil national de la Résistance. À sa sortie d'internement administratif, il est assigné à résidence et décède quelques mois plus tard, le 28 avril 1946, des suites d’une intervention chirurgicale.

Il est enterré au cimetière de Saint-Clément avec trois de ses fils, dont deux aviateurs morts pour la France. Même après sa disparition et malgré l’ambiguïté de son image, ses partisans restent très attachés à son souvenir. « Depuis la mort de mon grand-père, un certain nombre de fidèles éprouvaient le besoin d'aller se recueillir sur sa tombe. Il y avait un caractère d'improvisation, et une certaine attente », explique Hugues de la Rocque, petit-fils du colonel[1]. Quinze ans plus tard, jour anniversaire de la Déportation, le général de Gaulle, président de la République, fait remettre à Madame de La Rocque la médaille de déporté-résistant à titre posthume et réhabilite ainsi le souvenir du Colonel.

         François de La Rocque était lié à Vic-sur-Cère par le château d’Olmet qu’il avait eu l’occasion de louer avec sa famille pour les vacances estivales avant-guerre. En fait de château, il s’agit d’un manoir du XIXe siècle situé sur le versant est de la vallée de la Cère. Au début des années 1950, le domaine est acquis par la Fondation Jean Mermoz, dite de l'« Aérium des Croix », pour l'accueil et l'hébergement d'enfants orphelins de pilotes de l'armée de l'air et la prise en charge d'enfants atteints de difficultés respiratoires. C’est donc tout naturellement sur ce domaine que les amis du Colonel de La Rocque, associé à la Fondation Jean Mermoz, décident de faire édifier une chapelle en mémoire des aviateurs tués au combat, ainsi qu’une « Maison du souvenir ». Le musée est inauguré le 21 juin 1964 et ses collections ne cessent de s’accroître grâce à de nombreux dons. Il renfermera les archives du Colonel jusqu’en 1984, date à laquelle elles furent déposées aux Archives nationales pour des raisons de conservation matérielle et pour les rendre plus accessibles aux historiens. Les derniers partisans disparus, le souvenir de François de La Rocque s’est estompé et le musée a peu à peu perdu sa raison d’être, avant de fermer définitivement ses portes.

[1] « Le musée n'a pas survécu au souvenir » par Jean-Baptiste Ledys, La Montagne du 25 août 2011.

Cotes ADC : fonds Alphée Delrieu, plans en cours de classement ; portrait 40 Fi 372 catalogue du musée 8 BIB 80-37 ; photographie de la chapelle 31 NUM 10182

Document rédigée par Nicolas Laparra 

                                                                                                                                                   

 

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